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Afrique de l’Est et golfe d’Aden – Mind the Map

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Dans le cadre d’un partenariat bilatéral, Les Yeux du Monde publient à intervalles réguliers des cartes réalisées par Mind the Map, un blog fondé par Christophe Chabert, un passionné de cartographie et de géopolitique.

Cliquez pour voir la carte en haute définition.

L’Afrique de l’Est et le golfe d’Aden font partie des régions les plus instables de la planète. Cette carte a pour objectif de présenter une vision synthétique de la situation dans cette zone qui demeure d’une importance stratégique capitale pour le commerce mondial.

Géographiquement, nous avons fait le choix d’inclure dans l’Afrique de l’Est les pays de la corne de l’Afrique (Somalie, Éthiopie, Djibouti et Érythrée) et ses marges (Soudan, Soudan du Sud, Ouganda, Kenya, Rwanda, Burundi). Le Yémen est également intégré à l’analyse, car riverain du détroit de Bab-el-Mandeb et du golfe d’Aden.

D’un point de vue économique, les États de la région appartiennent tous à la catégorie onusienne des pays les moins avancés (sauf le Kenya). L’agriculture reste le principal secteur d’activité avec l’extraction des ressources naturelles. L’industrie manufacturière est peu développée voire inexistante ce qui ne permet pas à ces pays d’absorber le surplus de population rurale. Les indicateurs de développement humain (santé/longévité, niveau de vie et d’éducation) y sont par ailleurs très bas. Comme souvent, l’extrême pauvreté est la cause principale des crises et conflits qui secouent le monde et l’Afrique de l’Est en est l’exemple même.

Le premier chapitre de la carte liste l’ensemble des maux qui touche la région : les guerres civiles (Soudan du Sud, Somalie), les régimes autoritaires (Érythrée), l’instabilité politique (Soudan, République démocratique du Congo, Burundi), les conflits sur le tracé des frontières (notamment entre l’Éthiopie et l’Érythrée, officiellement indépendante depuis 1993), le développement du terrorisme et de la piraterie. Il est important de se pencher sur le cas de la Somalie, État totalement failli, qui continue de s’enliser dans un chaos débuté dans les années 80. Le groupe terroriste des Shebabs maintient un contrôle important sur les territoires du sud autour de la capitale Mogadiscio. Au nord, la région du Somaliland a fait sécession et celle du Puntland, toujours loyaliste, dispose d’une totale autonomie de fait. C’est également au large des côtes somaliennes que la piraterie est la plus intense.

Le Yémen est un cas à part. Pays arabe parmi les plus pauvres, son existence en tant qu’État a toujours été fragile du fait de la diversité des tribus qui le compose. Les régions de l’ouest sont majoritairement peuplées d’arabes zaydites (branche du chiisme) quand le reste du territoire (le sud et l’est) est sunnite. C’est principalement la recrudescence des tensions entre l’Arabie saoudite et l’Iran depuis les printemps arabes qui a fait basculer le pays. Comme lors de la guerre froide, les grandes puissances favorisent l’affrontement par États interposés. Accusant l’Iran de soutenir les rebelles Houthis (chiites), l’Arabie saoudite et sa coalition arabe mènent des raids aériens depuis 2015 qui ont laissé le Yémen exsangue. Et c’est sans compter sur la forte présence d’Al-Qaïda dans le pays qui ajoute encore de la complexité.

Les principales victimes du délitement de la région sont les populations locales. La guerre permanente déstabilise ces régions déjà pauvres en temps de paix. Depuis 2016, le Soudan du Sud, la Somalie, l’Éthiopie et le Yémen traversent des épisodes réguliers d’urgence alimentaire et de famine. Les conflits religieux gagnent en intensité dans cette zone où christianisme et islam vivent côte à côte. Surtout, ce sont les mouvements massifs de populations qui démontrent l’étendue des crises. L’Éthiopie, l’Ouganda et le Kenya sont les principaux récepteurs des flux de réfugiés des pays voisins (les camps de Dadaab et Kakuma au Kenya sont les plus grands du monde). Cela créé inévitablement des tensions internes entre populations locales et nouveaux arrivants tant leur nombre est important. Il ne faut pas non plus oublier les déplacés internes (personnes déplacées dans leur propre pays). Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (données à la fin 2016), ils seraient 2,2 millions en République démocratique du Congo, 1,6 million en Somalie, 1,9 million au Soudan du sud, 2,2 millions au Soudan et plus de 2 millions au Yémen.

Si l’Afrique de l’Est et le golfe d’Aden apparaissent en plein processus de fragmentation, il n’en demeure pas moins que la région concentre une très forte présence militaire étrangère. La raison est simple : le golfe d’Aden est au carrefour de très grandes routes commerciales permettant d’atteindre l’Europe (via le détroit de Bab-el-Mandeb puis le canal de Suez), le golfe Persique (principale zone de production des hydrocarbures) ainsi que l’Asie. Il est donc indispensable de protéger les cargos et super tankers de la piraterie. La Ve flotte des États-Unis patrouille dans ce secteur mais également les navires russes, chinois, indien, japonais et européens (opération Atalante). Djibouti est la clé de voûte du dispositif. Ancienne colonie française, elle accueille aujourd’hui les bases de nombreuses puissances étrangères dont la première base chinoise hors de son territoire. Les Émirats arabes unis sont également très proactifs : ils disposent d’une base à Assab en Érythrée et ont obtenu la concession du port de Berbera au Somaliland. L’objectif est ici double : sécuriser les routes commerciales et disposer de points d’appui proches du Yémen afin de mener des opérations militaires contre les Houtis.

La carte qui vous est présentée est une tentative de synthèse des grandes forces qui agitent la région. Elle n’en demeure pas moins incomplète et figée. Le choix de l’organisation de la légende est un parti pris et aurait pu être bien différent. Elle ne prétend pas délivrer la vérité, seulement de fournir les informations de base qui vous permettront de prendre la hauteur nécessaire pour décortiquer l’actualité et, je l’espère, vous donner l’envie de vous intéresser plus en profondeur à cette zone grise de la mondialisation.

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